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Et si l’assiette faisait le plat ?

On parle beaucoup de ce qu’on met dans l’assiette. Mais rarement de l’assiette elle-même — ou de ce qui en tient lieu.
Publié le 22 septembre 2025,

Parce que certains plats n’auraient pas vraiment le même goût sans leur contenant fétiche. Du fish and chips roulé dans son papier au dim sum servi dans son panier bambou, le décor compte autant que la recette.

On a tendance à croire qu’un plat, c’est avant tout des ingrédients, une cuisson, un assaisonnement. Bref : du contenu. Mais si on y regarde de plus près, beaucoup de nos souvenirs de table tiennent autant au contenant qu’au goût. L’assiette, la boîte, le sac, le panier — ces objets souvent invisibles façonnent notre expérience. Ils disent comment on mange, où on mange, et avec qui.

Prenons le fish and chips. Sur le papier, ce n’est qu’un poisson frit et des pommes de terre découpées. Mais qui aurait envie de le déguster bien installé, couteau et fourchette en main, dans une assiette en porcelaine ? L’expérience perdrait sa saveur. Le fish and chips se mange debout, dans la rue, roulé dans du papier journal qui s’imprègne de graisse et craque au moindre pli. C’est un plat populaire, pensé pour être englouti vite, sur le pouce, avec l’impression de tenir un morceau de Grande-Bretagne entre ses mains. Ici, le contenant ne se contente pas d’accompagner : il raconte l’histoire du plat.

À plusieurs fuseaux horaires de là, le tiffin indien illustre une autre philosophie. Cette tour métallique à compartiments, livrée par les fameux dabbawalas de Mumbai, est une leçon de logistique et de culture culinaire. Chaque étage dévoile une partie du repas : riz parfumé, curry, légumes, dessert. Posé dans une assiette unique, le tout paraîtrait banal, presque fade. Empilé dans un tiffin, le repas devient une aventure à étages, une construction où chaque bouchée trouve sa place. Le contenant fait office de dramaturgie.

La pizza, elle, a élu domicile dans sa boîte en carton. Carrée, légèrement gondolée, tachée d’huile, elle est devenue une icône mondiale. Bien plus qu’un simple emballage, la boîte incarne un mode de vie : convivial, improvisé, parfois chaotique. On ouvre le couvercle comme on ouvre un rituel collectif : autour d’une table, au bureau, ou seul devant une série. La boîte rend la pizza partageable et transportable. L’assiette individuelle, en comparaison, paraît tout de suite hors sujet — comme si on voulait habiller un plat qui s’est toujours pensé décontracté.

La baguette française, elle, a trouvé son identité dans un objet presque invisible : le sac en papier. La moitié dépasse toujours, le quignon se fait grignoter sur le chemin, et le papier se froisse en laissant passer l’odeur chaude de la croûte. Là encore, le contenant est plus qu’un détail pratique : il incarne un rituel national. Une baguette servie entière, posée sur une assiette ? L’image est absurde. Ce pain-là se transporte, se partage, se vit dans l’instant — et le sac en papier en est la scène.

Et puis il y a les dim sum. Ces petites bouchées vapeur n’ont pas seulement besoin d’un panier en bambou pour cuire, elles en ont besoin pour être comprises. Le geste de soulever le couvercle, de voir la vapeur s’échapper, de découvrir un assortiment de raviolis colorés : tout cela fait partie de l’expérience. Le bambou n’est pas un simple ustensile, il est l’écrin. Il rythme le repas, il lui donne une forme. Un dim sum posé seul dans une assiette, c’est une perte de magie, comme un cadeau sans papier.

Tous ces exemples montrent la même chose : le contenant façonne le récit. Il prolonge le goût, il ajoute une texture visuelle, tactile, parfois même sonore. Il inscrit le plat dans une culture, dans une pratique, dans une mémoire collective.

Alors oui, on peut réduire la nourriture à son contenu. Mais ce serait passer à côté de ce qui la rend vivante. Un plat, ce n’est pas qu’une recette, c’est aussi une mise en scène. Et parfois, c’est l’assiette — ou ce qui la remplace — qui fait tout le plat.

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